Le changement climatique menace les mangroves de l’Océan Pacifique

Un nouveau rapport du PNUE, "Les mangroves des îles du Pacifique face à un climat en évolution et la montée des mers", rappelle l’état des lieux des mangroves du Pacifique et des riques qu’elles encourrent dans le cadre du changement climatique. Ce rapport propose également des stratégies liées à l’aménagement du littoral pour préserver cet écosystème marin, indispensable notamment pour le maintien de la ressource halieutique et protéger les côtes.

Ce rapport concerne directement les îles et territoires côtiers du Pacifique, mais il est également applicable aux zones Caraïbes. Les pistes de préservation présentées dans ce rapport sont en grande partie exploitables pour le maintien de nos mangroves, en Guadeloupe, à la Martinique et en Guyane.

Télécharger le rapport en anglais : http://www.unep.org/PDF//mangrove-report.pdf

Voici le communiqué de presse du PNUE, également visible en ligne sur le site www.unep.org :

Nairobi, Apia, Honolulu, le 18 juillet 2006
Il faut agir d’urgence pour préserver les mangroves du Pacifique qui sont aujourd’hui menacées par l’élévation du niveau des mers résultant du changement climatique qui risque de submerger de vastes étendues de ces écosystèmes précieux de grande valeur économique.

Une étude, rendue public aujourd’hui par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), indique que certaines îles de la région perdront progressivement plus de la moitié de leurs forêts de mangrove d’ici la fin du siècle. Les îles les plus menacées sont les Samoa américaines, les îles Fiji, Tuvalu et les Etats fédérés de Micronésie.

L’étude, une évaluation de la vulnérabilité de 16 Etats et territoires insulaires du Pacifique qui abritent des mangroves indigènes, conclut que près de 13 pour cent de l’aire de répartition de la mangrove risque de disparaître.

Elle propose une série de recommandations à l’intention des planificateurs de l’aménagement du littoral, allant de la réduction de la pollution d’origine terrestre afin d’améliorer la santé et la résilience des mangroves existantes, à la réhabilitation des zones humides, dégradées ou perdues, où l’on trouvait des mangroves.

Le rapport note qu’il est également possible, le long de certaines sections du littoral des îles du Pacifique, d’éloigner les infrastructures et les aménagements de la côte afin de permettre aux mangroves de se répandre plus à l’intérieur.

Achim Steiner, le Directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l’environnement, a déclaré : « Il existe de nombreux arguments irréfutables qui soutiennent la lutte contre le changement climatique. Les menaces auxquelles sont confrontées les mangroves du Pacifique, et donc toutes les terres basses des tropiques, nous donnent une raison de plus d’agir ».

Selon lui, « Les pays industrialisés doivent honorer leurs engagements vis-à-vis du Protocole de Kyoto, le traité international pour la réduction des émissions, comme un pas vers les réductions encore plus sévères nécessaires pour stabiliser l’atmosphère».

M. Steiner a ajouté : « Mais il faut également agir d’urgence afin d’aider les communautés vulnérables à s’adapter à l’élévation déjà observée du niveau de la mer. Le rapport offre des conseils avisés sur les différents régimes de gestion à adopter pour améliorer la santé et la résilience des zones et écosystèmes côtiers, tels que les mangroves, face aux menaces actuelles et à venir ».

Le nouveau rapport, intitulé « Les mangroves des îles du Pacifique face à un climat en évolution et la montée des mers», a été compilé par le Programme des mers régionales du PNUE, le Secrétariat du Programme d’environnement de la région du Pacifique basé à Apia (Samoa), le Conseil de gestion des pêches du Pacifique occidental (Honolulu, Etats-Unis) et plus d’une douzaine d’autres agences et organisations des îles du Pacifique.

Kitty Simonds, Directeur exécutif du Conseil de gestion des pêches du Pacifique occidental, explique qu’« à cause des liens fonctionnels entre les zones humides à mangroves et les autres écosystèmes côtiers, et à cause de leur contribution importante à la production halieutique à proximité des côtes, les gouvernements et les communautés locales des îles du Pacifique doivent impérativement agir maintenant pour assurer l’approvisionnement durable des services offerts par les écosystèmes de mangroves. Le Conseil a récemment entamé la substitution de l’ensemble de ses plans actuels de gestion des pêches par des plans intégrés, basés sur les écosystèmes, pour chaque archipel. Les conclusions et les recommandations qui découlent de cette étude contribuent à l’élaboration de ces nouveaux plans portant sur les écosystèmes halieutiques et adaptés au lieu ».

La vraie valeur économique des écosystèmes comme les mangroves ressort de plus en plus grâce à des rapports historiques tels que l’Evaluation des écosystèmes pour le millénaire, l’œuvre de quelques 1.300 scientifiques et experts.

In the Front Line : Shoreline Protection and other Ecosystem Services from Mangroves and Coral Reefs ( « Dans la ligne de front : la protection du littoral et autres services rendus par les écosystèmes, des mangroves aux récifs coralliens ») est une autre évaluation récente et remarquable. Elle a été entreprise par de nombreuses organisations, dont le Centre mondial de surveillance continue de la conservation de la Nature du PNUE.

Ces évaluations affirment toutes que, comme les récifs coralliens et d’autres écosystèmes terrestres et marins, les mangroves fournissent une variété de produits et services sur lesquels dépendent les populations et les industries locales, y compris le tourisme.

  • Les mangroves représentent une nourricerie importante pour poissons, elles filtrent la pollution côtière et pour la population locale, constituent aussi, une source vitale de bois et autres matériaux de construction. Les habitants des îles du Pacifique en tirent également des teintures utilisées dans le traitement de textiles, de filets et de pièges à poisson.
  • La santé des mangroves a des répercussions sur la santé d’autres écosystèmes d’importance économique et biologique, comme les récifs coralliens et les herbiers marins.
  • Les mangroves jouent également un rôle de protection du littoral. En passant à travers juste 200 mètres de mangroves, 75 pour cent de la puissance d’une vague est dissipée.
  • Selon certaines estimations, les produits et les services générés par les mangroves s’élèvent en moyenne à 900.000 dollars le kilomètre carré, selon où elles se trouvent et comment elles sont exploitées.
  • Au Thaïlande, des études ont évalué le chiffre annuel à 3.5 millions le kilomètre carré et aux Samoa américaines, à un peu plus de 100.000 dollars le kilomètre carré.
  • Près de 75 pour cent des crevettes pêchées à des fins commerciales dans le Queensland en Australie sont tributaires des mangroves.
  • Une forêt de mangroves de 400 kilomètres carrés gérée durablement au Matant (Malaisie) abrite des réserves halieutiques d’une valeur annuelle de 100.000 millions de dollars.
  • Selon certaines estimations, les produits forestiers tirés des mangroves du Matang pourraient rapporter 10 millions de dollars par an.
  • Près de la moitié de l’aire de répartition mondiale de la mangrove a été perdue depuis 1990, en conséquence de la destruction des forêts pour faire place aux fermes à crevettes. Trente-cinq pour cent des pertes ont eu lieu ces deux dernières décennies.

Eric Gilman de l’Université de Tasmanie et l’auteur principal du rapport a déclaré : « Non seulement le rapport explique-t-il clairement les risques, il identifie également les besoins prioritaires pour le renforcement des capacités techniques et institutionnels au niveau national et régional. »

« Le rapport offre aussi les principaux éléments d’une stratégie, adaptée à un milieu particulier, que les administrateurs de zones côtières peuvent mettre en œuvre dans le but de minimiser et de contrebalancer les pertes anticipées de mangroves suite au changement climatique. Ces éléments se concentrent sur une approche fondée sur la communauté et la gestion intégrée des zones côtières ainsi que la sensibilisation du public », a-t-il ajouté.

Vainuupo Jungblut, Responsable associé Ramsar au Conseil de gestion des pêches du Pacifique occidental et un des auteurs du rapport, a noté : « Un des défis majeurs auxquels doit faire face la région des îles du Pacifique est le changement climatique et la montée du niveau de la mer, ainsi que l’acclimatation aux réactions des écosystèmes côtiers à ces forces. Le défi auquel la région est confrontée est de mettre en œuvre des mesures d’adaptation abordables et appropriées, à l’aide de ressources limitées. Ce rapport aidera les responsables de l’aménagement du territoire à évaluer la vulnérabilité et à identifier les techniques d’adaptations les plus appropriées. »

Hanneke Van Lavieren du Programme des mers régionales du PNUE, qui a également contribué à la rédaction du rapport, a noté que : « Le Sommet mondial sur le développement durable a en 2002 fixé une cible ambitieuse, (réduire significativement la déperdition de la biodiversité d’ici 2010) comme contribution à la lutte contre la pauvreté et à la recherche de la prospérité. Nous espérons que ce nouveau rapport et ces recommandations relatives aux mangroves et aux changements climatiques jouera un rôle dans la réalisation de cet objectif de biodiversité dans le Pacifique ».