Jégo apporte à Mayotte un message d’apaisement

article paru dans le Figaro du 28 mars 2008

Le secrétaire d’État à l’Outre-Mer ne remet pas en cause le droit du sol.

Pour son premier déplacement à Mayotte, le nouveau secrétaire d’État chargé de l’Outre-Mer, Yves Jégo, n’aura pas eu droit à l’accueil, plus ou moins spontané, traditionnellement réservé auxcortèges ministériels par les femmes mahoraises, le long de la route de l’aéroport. Tout au plus, quelques zébus, attachés sur les bas-côtés, ont pu observer avec indifférence la scène. Maisaprès les émeutes, qualifiées par la presse locale de «chasse aux Blancs », qui ont embrasé l’île dans la nuit de mercredi à jeudi et qui se sont poursuivies toute la journée d’avant-hier(nos éditions d’hier), le ministre ne s’attendait pas à «une balade touristique ». Dès son arrivée, il a tenu à donner un «message d’apaisement » à la population. «Rien ne justified’ajouter de la violence à la violence», a-t-il déclaré, après avoir rendu une visite à l’hôpital de Mamoudzou «aux victimes de ces événements graves».

Après l’arrestation mercredi à Mayotte du colonel Mohamed Bacar, qui fuyait Anjouan après le débarquement des troupes de l’Union africaine (UA) dans son île, deux heures plus tôt, de nombreuxAnjouanais, pour la plupart en situation irrégulière 1 000 à 1 500, selon la police , s’en étaient en effet pris aux M’Zungu (Blancs), accusés de protéger «le dictateur» Bacar. Desdizaines de métropolitains ont été «tabassés» et une vingtaine ont été blessés, dont un, dans un état grave, a été transféré à Saint-Denis de la Réunion. Le pire a sans doute été évité, mais letraumatisme risque de perdurer longtemps. Malgré le calme apparent qui régnait hier dans les rues de Mamoudzou, chacun reconnaissait craindre que «tout puisse redémarrer d’un coup». «Un peu àl’africaine», susurrait un policier. Pour Brigitte, conseillère conjugale à Mamoudzou depuis trois ans, la décision est prise : ce sont «les valises»…

 

Pression migratoire

Député MoDem de Mayotte, Abdoulatifou Aly parle de «traumatisme». «Oui, il y a bien eu une chasse aux Blancs, mais ce n’étaient pas des Mahorais qui l’ont faite. Au contraire, beaucoup d’entrenous avons été pris à partie par ces hordes de barbares anjouanais pour avoir tenté de défendre des Français de métropole.» «Je dirai qu’à travers ces événements, nous savons désormais quellemenace les immigrés anjouanais, qui représentent 30 % de la population de l’île, font peser sur nos têtes», explique le député.

Conscient de «cette pression migratoire inquiétante», Yves Jégo, après avoir félicité les forces de l’ordre, a promis de réfléchir à «la mise en place d’un dispositif global» pour lutter contrece phénomène. Peu partisan d’une remise en cause du droit de sol à Mayotte, comme l’avaient suggéré deux de ses prédécesseurs, François Baroin et Christian Estrosi, il veut être «imaginatif». «Jeviens sans dogmatisme, pour essayer de comprendre la situation». Tout au plus avance-t-il l’idée d’un renforcement de la coopération avec le gouvernement fédéral des Comores pour tenter derefréner l’envie de venir émigrer à Mayotte.